UICN Approche et Actions pour la Résilience au Changement Climatique Mode d'emploi
UNION INTERNATIONALE POUR LA CONSERVATION
DE LA NATURE
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Approche et Actions pour la
Résilience au Changement C limatique
Approche et Actions pour la
Résilience au Changement C
limatique
APPROCHE ET ACTIONS POUR LA RÉSILIENCE AU CHANGEMENT CLIMATIQUE
Approche et Actions pour la
Résilience au Changement C
limatique
Projet SEARCH au Maroc
UAE - UICN Med - ATED
Mohamed JABRANE et Lahcen TAIQUI
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1
6
2 3
4
Photos de couverture:
1.- Touffes de palmier nain dans un champ (humidité-consolidation du sol, exploitation de la plante) @ Equipe SEARCH
2.- Pépinière avec système de brumisation @ Equipe SEARCH
3.- Système bocager du Rif occidental @ Equipe SEARCH
4.- Femmes en atelier participatif @ Equipe SEARCH
6.- Femme du Nord marocain dans une parcelle de plantation des PAM @ Equipe SEARCH
La terminologie géographique employée dans cet ouvrage, de même que sa présentation, ne sont en aucune manière l’expression d’une opinion quelconque de la part de l’UICN ou de l’Union Européen sur le statut juridique ou l’autorité de quelque pays, territoire ou région que ce soit, ou sur la délimitation de ses frontières.
Les opinions exprimées dans cette publication ne reflètent pas nécessairement celles de l’UICN ou de l’Union Européene.
Le présent ouvrage a pu être publié grâce à un soutien financier de l’Union Européen.
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Jabrane, M. et Taiqui, L. (2014). Approche et Actions pour la Résilience au Changement Climatique. UICN, Malaga, 40p.
978-2-8317-1672-5
Equipe SEARCH
Simétrica S.L.
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Sommaire
INTRODUCTION.............................................................................................................................................1
LE PROJET SEARCH.................................................................................................................................... 2
CONCEPTS DE BASE....................................................................................................................................3
La résilience.............................................................................................................................................. 3
Le changement climatique........................................................................................................................5
CHANGEMENT CLIMATIQUE ET SES IMPACTS AU MAROC..................................................................7
PLANIFICATION DE LA RESILIENCE ........................................................................................................10
Approche participative ............................................................................................................................10
Description du site du projet SEARCH...................................................................................................11
Cycle de planification participative.........................................................................................................14
Analyse des parties prenantes................................................................................................................15
Vision .......................................................................................................................................................16
Evaluation de la vulnérabilité...................................................................................................................18
Scenarios, stratégies et planification adaptative ..................................................................................22
ACTIONS PILOTES ......................................................................................................................................26
Facilitation................................................................................................................................................26
Planification participative ........................................................................................................................27
Organisation des communautés locales ................................................................................................29
Captage des eaux pluviales....................................................................................................................29
Domestication des plantes aromatiques et médicinales .......................................................................32
Fours à pain améliorés............................................................................................................................35
Biométhanisation.....................................................................................................................................35
Cuvettes en demi-lunes ..........................................................................................................................36
Cordons de pierres..................................................................................................................................37
Terrasses avec murets ............................................................................................................................38
Haies vives...............................................................................................................................................39
Centre de Coopération pour la Méditerranée de l’UICN
APPROCHE ET ACTIONS POUR LA RÉSILIENCE AU CHANGEMENT CLIMATIQUE
INTRODUCTION
Durant les dernières décennies, la fluctuation du climat à l’échelle planétaire a soulevé de multiples interrogations quant à la pérennité et la gravité du phénomène.
Dans son 4
ème rapport, le Groupe
Intergouvernemental d’Experts sur l’Evolution du Climat (GIEC) affirme que la terre est soumise non seulement à des variations naturelles du climat mais aussi à des changements climatiques dus à l’activité anthropique. Les derniers rapports de 2013/2014 du même groupe d’experts confirment que le changement climatique est sans équivoque.
Pour faire face à la gravité de ce phénomène, la communauté internationale s’est engagée dans un processus de réflexion sur les stratégies et les projets pouvant être articulés afin de répondre à ce défi. Lequel ne peut être relevé que par la participation et l’engagement de tous les intervenants, à tous les niveaux, y compris les communautés locales.
Il est nécessaire alors, surtout dans les pays en développement, de renforcer les capacités des différents acteurs à l’échelle locale. Ce renforcement de capacités doit être basé sur la mise en place de processus appropriés d’apprentissage collectif et de partage d’expériences et de connaissances.
Dans ce sens, la gestion des connaissances est fondamentale pour la création, la diffusion et le partage de la connaissance en vue d’influencer les pratiques individuelles, organisationnelles, et/ou politiques publiques
1
. La connaissance est en fait une source de leçons et constitue un
1
1 http://www.undp-aap.org/sites/undp-aap.org/files/AAP_Manuel_Capitalisation_Experiences%28version_provisoire%29.pdf
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APPROCHE ET ACTIONS POUR LA RÉSILIENCE AU CHANGEMENT CLIMATIQUE
capital comme le capital financier et technique. La capitalisation permet de valoriser et produire de la connaissance, contribuer à l’élaboration d’un patrimoine institutionnel de connaissances, générer des outils d’apprentissage et fournir des contenus communicationnels. Le partage des savoirs traditionnels, des savoirs locaux et des savoirs scientifiques permet de renforcer le processus de mise en œuvre de projets et/ou programmes de développement.
Produit dans le cadre du Projet « Résilience
Agricole, Ecologique et Sociale face au
Changement Climatique (SEARCH) » au
Maroc, ce document est destiné au partage des approches, méthodologies et expériences « pilotes » réalisées, au Rif occidental ou ailleurs, face au changement climatique. L’objectif est de promouvoir l’approche du projet à la résilience face au changement en intégrant en plus des technologies adaptatives, la diversification, l’auto-organisation et l’apprentissage.
Ce document présente, en plus du processus participatif conduisant à l’élaboration des stratégies adaptatives par l’approche SEARCH, des actions résilientes réalisées face au changement climatique.
LE PROJET SEARCH
Le projet « Résilience Agricole, Ecologique et Sociale face au Changement Climatique»
SEARCH (
Social, Ecological, and
Agricultural Resilience in the face of Climate
Change) est un projet régional déployé dans cinq pays arabes méditerranéens:
Egypte, Jordanie, Liban, Maroc et
Palestine 2 .
Il s’agit d’un projet financé par l’Union
Européenne pour une période de trois ans
(2011-2013) dont l’objectif est l’élaboration et la mise en œuvre d’un « cadre de résilience face aux changements climatiques ».
Ce « cadre de résilience » vise de façon spécifique à renforcer les capacités et les méthodologies de planification de l’action locale par le biais de l’apprentissage collectif au profit des parties prenantes et par la réalisation d’actions et « projets pilotes », au niveau de bassins hydriques. Les approches/composantes du projet sont :
1 - le renforcement des capacités des partenaires et des parties prenantes en matière d’utilisation d’outils, de stratégies et de planification de l’adaptation au changement climatique.
2 - la planification participative et l’action
collective par le biais d’élaboration de plans d’adaptation des communautés et par la mise en place de stratégies de gestion de la résilience climatique à l’échelle des bassins hydriques.
3 - la démonstration par des projets
pilotes et la concrétisation des stratégies
élaborées en utilisant des méthodes adéquates, des techniques appropriées et des procédés innovateurs au niveau des communautés et au niveau des bassins hydriques.
4 - la documentation des processus
d’apprentissage collectif, le partage de l’information et des savoirs, la vulgarisation des approches et des méthodes déployées par l’utilisation des différents moyens médiatiques aussi bien écrits qu’audiovisuels.
Les groupes cibles sont d'une part des femmes, des paysans, des associations et des coopératives, et d'autre part, des élus
2 https://www.iucn.org/about/union/secretariat/offices/rowa/iucnwame_ourwork/iucnrowa_cc/ search_2/
A) B)
A) Planification participative. B) Groupes cibles: les femmes des collectivités territoriales et ingénieurs et techniciens qui interviennent dans le bassin.
Au Maroc les groupes ciblés par le projet
SEARCH sont les populations de six communes rurales du Bassin Oued El Kebir
(amont Barrage Martil) et une vingtaine de cadres et responsables des services publics et administratifs.
CONCEPTS DE BASE
La résilience
La résilience est «
la capacité d’un système social ou écologique d’absorber des perturbations tout en maintenant la même structure de base et modes de fonctionnement, la capacité d’auto organisation et la capacité d’adaptation au
stress et au changement »
3 . Sous l’effet du changement climatique, la résilience ne signifie pas un ajustement pour maintenir une situation donnée. Dans les systèmes sociaux et écologiques interdépendants et complexes, la résilience signifie plutôt agir pour transformer des communautés et des
économies vers des configurations qui fonctionnent mieux sous un nouveau régime climatique dynamique 4 .
Le cadre de résilience face au changement climatique adopté par le projet SEARCH est basé sur quatre composantes (fig. 1) :
a- la diversité ; signifie la richesse et l’abondance des éléments. En cas de déclin d’une partie du système, la continuité du fonctionnement du système est assurée grâce à la redondance fonctionnelle offerte par la diversité. Celleci favorise donc l’aptitude d’un système à
évoluer tout en gardant le même contrôle sur sa structure et son fonctionnement.
Aussi bien en écologie qu’en économie et mode de production, la diversité renforce le fonctionnement. Ce sont les différentes
3
3 GIEC, 2008. IPCC Fourth Assessment Report: Climate Change 2007.
4 FOLKE C., CARPENTER S. R., WALKER B., SHEFFER M., CHAPIN T. & ROKSTROM J., 2010. Resilient thinking: integrating resilience, adaptability and transformability. Ecology and Society 15(4):20. http:///www. Ecology and society. org/vol/iss4/art20/
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APPROCHE ET ACTIONS POUR LA RÉSILIENCE AU CHANGEMENT CLIMATIQUE
composantes de la diversité (agriculture, industries, commerces …) qui assurent à la société des moyens et des possibilités d’adaptation. En plus, lorsqu’un groupe de diverses parties prenantes partage l’information et la gestion d’une ressource, la prise de décision peut être meilleure et facilement admise par la société. La biodiversité, quant à elle, assure la disponibilité des services écologiques pour atténuer les adversités et soutenir la viabilité et la productivité.
b- l’infrastructure ; dite aussi structure physique est à la base du fonctionnement.
Elle comprend :
–
Le milieu naturel, qui garantit la conservation et la mobilité des espèces et qui assure la régulation des flux des matières et d’énergie. C’est l’ensemble des couverts naturels et le réseau hydrique qui assurent les services
écologiques indispensables.
– L’
infrastructure construite par l’homme
comme les réseaux routiers, les retenues d’eau, l’immobilier et tout ce qui est « introduit » par l’homme dans les paysages naturels.
C’est la gestion durable et adaptée de ces infrastructures et l’utilisation de technologies conventionnelles adéquates qui peuvent réduire les vulnérabilités et atténuer les impacts du changement climatique.
c- la capacité d’autorégulation ; cette autre caractéristique des systèmes résilients traduit la capacité endogène de reconstruction et redéploiement. Hautement adaptative, elle permet la remise en place de la structure et le dynamisme après perturbation. Au niveau des communautés, cette caractéristique est mise en œuvre à travers la gouvernance participative et le renforcement des capacités.
Economie,
Moyens de subsistance et Biodiversité
Diversité
Gouvernance participative
Reforcement de capacités
Technologie et infrastucture durable
Résilience
Auto-organisation et Gouvernance
Infrastucture naturelle et d’ingénierie
Technologies durables
Apprentissage
Figure 1. Cadre de Résilience Climatique.
Compétences
Sensibilisation
d- l’aptitude à construire et à augmenter la capacité
d’apprentissage. Les parties prenantes peuvent utiliser de nouvelles technologies et compétences d’adaptation, elles peuvent aussi utiliser l’information et les stratégies adaptatives disponibles. C’est grâce à l’accumulation d’expériences génétiquement et culturellement mémorisées et transmises que l’histoire de la nature et de la société humaine évolue. Tributaire de l’adaptation, l’évolution de l’humanité traduit la valorisation des savoirs acquis et leur amélioration par l’apprentissage collectif permanent.
Ces quatre caractéristiques/composantes du « cadre de la résilience climatique » déterminent les actions à entreprendre et les stratégies à élaborer pour construire la résilience.
Le changement climatique
Tout au long de ces cinq dernières décennies, l’ensemble des continents a connu des fluctuations majeures du climat ayant fait et font encore l’objet de nombreuses études aussi bien sur leur pérennité que sur leur gravité. Ces perturbations climatiques ont provoqué des catastrophes naturelles dévastatrices : cyclones, ouragans, fonte de glaciers, pluies diluviennes, inondations, glissements de terrains, sécheresses sévères etc. Les spécialistes du Groupe d’Experts Intergouvernemental sur l’Evolution du Climat (GIEC) affirment que la terre est soumise non seulement à des variations naturelles du climat mais aussi à des changements climatiques dus à l’activité de l’homme 5 .
Ces changements climatiques qui déstabilisent les écosystèmes (dégradation, exténuation…) et exercent une forte pression sur les ressources naturelles
(surexploitation, déforestation…) rendent les pays en développement beaucoup plus vulnérables. Lesdits pays dépendent
énormément des ressources naturelles et manquent de moyens financiers, de moyens technologiques et de compétences humaines pour faire face aux impacts des changements climatiques.
D’après le GIEC, le changement climatique signifie une variation du climat que l’on peut déceler (par ex. au moyen de tests statistiques) par des modifications de la moyenne et/ou de la variabilité de ses propriétés et qui persiste pendant une longue période. Généralement pendant des décennies et plus. Cette variation se rapporte à tout changement dans le temps qu’il soit dû à la variabilité naturelle ou à l’activité humaine. Cette définition diffère de celle de la Convention des Nations Unis sur le Changement Climatique (CNUCC) selon laquelle le changement climatique désigne les changements attribués à une activité humaine et qui viennent s’ajouter à la variabilité naturelle du climat observée au cours de périodes comparables. En somme, le réchauffement du climat est sans équivoque. On note déjà, à l’échelle du globe, une hausse des températures moyennes de l’atmosphère et de l’océan, une fonte massive de la neige et de la glace et une élévation du niveau de la mer.
L’augmentation de la température moyenne du globe observée depuis 1950 est très probablement due à la hausse des concentrations des gaz à effet de serre
(GES). A l’exception de l’Antarctique, tous les continents ont subi un réchauffement provoqué par l’activité de l’homme.
5 IPCC, 2013: Climate Change 2013: The Physical Science Basis. Contribution of Working Group I to the Fifth Assessment Report of the Intergovernmental Panel on Climate Change [Stocker, T.F., D. Qin, G.-K. Plattner, M. Tignor, S.K. Allen, J. Boschung, A. Nauels, Y.
Xia, V. Bex and P.M. Midgley (eds.)]. Cambridge University Press, Cambridge, United Kingdom and New York, NY, USA, 1535 pp.
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APPROCHE ET ACTIONS POUR LA RÉSILIENCE AU CHANGEMENT CLIMATIQUE
6
La maîtrise des émanations, en l’occurrence l’
atténuation (mitigation), signifie la mise en œuvre de politiques en vue de réduire les émissions de GES et d’accroître le captage et le stockage de ces gaz. Cependant, même si les
émissions de gaz à effet de serre étaient maîtrisées, le réchauffement produit par l’activité de l’homme et l’élévation du niveau de la mer se poursuivraient pendant plusieurs décennies car les processus et rétroactions du climat nécessitent énormément de temps (des décennies et des siècles). Il est par conséquent nécessaire de mettre en place des stratégies d’adaptation à moyen et à long terme.
L’
adaptation est l’ajustement des systèmes naturels ou humains au changement climatique et à ses effets. La planification de l’adaptation dépend de l’analyse de la
vulnérabilité puisque les impacts potentiels et les capacités adaptatives sont inégalement répartis entre les systèmes. En fait, la vulnérabilité est tributaire de l’exposition, de la sensibilité et de la capacité d’adaptation du système à la variation climatique. L’exposition et la sensibilité sont généralement estimées en fonction des modèles globaux et régionaux de projections futures, selon différents scénarii. La prédiction du changement climatique au niveau local nécessite une mise en échelle appropriée.
CHANGEMENT CLIMATIQUE
ET SES IMPACTS AU MAROC
6
A l’instar de l’ensemble des pays de la planète, le Maroc subit les effets des changements climatiques avec les spécificités que lui confèrent sa position géographique et les particularités de ses
écosystèmes. Situé au nord-ouest de l’Afrique, entre deux zones climatiques
(tempérée au nord et tropicale au sud), le
Maroc a un climat méditerranéen très varié : perhumide, humide, subhumide, semi-aride, aride et saharien. Les observations des dernières décennies montrent l’avancée du climat aride et semi-aride vers le nord du pays. Les projections climatiques prévoient une aggravation de la situation tout au long du XXIème siècle.
1. Tendances du changement climatique au Maroc :
La seconde communication nationale sur le climat présentée en 2010 confirme que durant les dernières décennies, le pays a connu un réchauffement significatif et une augmentation de la fréquence et de l’intensité des événements extrêmes. De
1960 à 2000 le réchauffement moyen global a été autour de 1°C sur tout le territoire, avec un maximum de 1,4°C dans la région sud-est du pays. Les vagues de chaleur ont nettement progressé au détriment des vagues de froid. De 1976 à 2006, les pluies ont diminué de 3 à 30% selon les régions avec une régression, en particulier hivernale, dans les hauts plateaux de l’Oriental. Pendant la même période, les précipitations du trimestre février-avril ont baissé de 23 mm en moyenne et de 38mm
(l’équivalent du tiers de la normale) dans le nord-ouest du pays. Les épisodes de sécheresse en saison pluvieuse
(septembre-avril) se sont allongés de plus de 15 jours. De 1995 à 2010, l’intensité et la fréquence des inondations ont été de plus en plus importantes. Des crues massives ont affecté les différentes régions du pays avec des pertes humaines et dégâts
économiques importants.
2. Projections climatiques :
Les projections futures des changements climatiques au Maroc ont été simulées en utilisant l’algorithme de régionalisation
SCENGEN, à partir des résultats du modèle climatique global MAGICC. Les résultats résumés dans le tableau suivant montrent des différences importantes entre différentes grandes régions du pays. La température moyenne augmenterait en
2045 par rapport à la période de référence
(1960-1990) de 1.6 au Sud à 2.1°C dans l’Oriental. A l’horizon 2045, les précipitations moyennes diminueraient selon le scénario A1B (scénario pessimiste) de 8.5 au Sud à 16.5% au Centre. Pour le scénario B2 (scénario optimiste), la diminution serait de 10.2 à 13.6%.
3. Eléments de sensibilité du Maroc au changement climatique :
De part sa situation géographique, sa structure topographique et la nature de son couvert végétal, le Maroc présente des vulnérabilités intrinsèques :
– une importante façade maritime étendue en latitude (3400 km)
– un domaine montagneux (quatre chaines) avec de fortes différences en étendue et en altitude.
7
6 Seconde Communication Nationale sur les Changements Climatiques (2010) et Rapport National des objectifs du Millénaire pour le
Développement (2009).
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APPROCHE ET ACTIONS POUR LA RÉSILIENCE AU CHANGEMENT CLIMATIQUE
– une grande fragilité de certains
écosystèmes (zones littorales, vallées présahariennes, …) et une faune et une flore extrêmement diversifiées
– une répartition irrégulière des précipitations dans le temps et dans l’espace (2000 mm sur les reliefs au nord
à moins 25 mm dans le désert au sud)
– une urbanisation croissante des zones à risques (littoral, lits des oueds, …)
– manque de connaissances pertinentes sur l’adaptation aux changements climatiques
– inégalités face aux effets négatifs du changement climatique (les couches sociales pauvres sont les plus vulnérables).
4. Impacts du changement climatique au
Maroc :
Sous l’effet des sécheresses sévères et fréquentes qu’a connues le pays ces dernières décennies, la baisse des apports en eau a atteint 20% sur la période 1940-
2005 et la température moyenne a augmenté de plus de 1°C entre 1960 et
2000. La récurrence de ces sécheresses et la tendance de la réduction des précipitations vont entrainer une baisse des ressources en eau superficielles et souterraines estimée entre 10 et 15% environ d’ici l’an 2020. Par ailleurs le phénomène de crues s’est accentué durant les deux dernières décennies (Ourika en
1995, Tétouan en 2000, Mohammedia en
2002, Merzouga en 2006, Tanger, Nador, Al
Hoceima, Fnideq en 2008, Er-Rachidia et
Rabat en 2009, les régions d’El Gharb du
Sous en 2010).
Le déficit en eau, estimé à près de 5 milliards de m 3 à l’horizon 2030, pénalise l’ensemble de l’économie. Les impacts sur l’alimentation, la santé humaine et les
écosystèmes affectent, d’ores et déjà, tous les territoires. La dégradation des cultures, des parcours et des sols conduit à un fort accroissement du taux d’envasement des retenues des barrages, qui pourrait dans de nombreux bassins versants dépasser 1% par an du volume de la retenue du barrage.
Les cultures pluviales seront particulièrement affectées par la réduction des précipitations. La grêle et le gel peuvent avoir aussi des incidences économiques importantes. Dans le futur, les pertes de rendement des céréales risquent de causer l’exode de près de 6 millions d’habitants.
De même, la dégradation de l’espace forestier aura des répercussions graves sur les populations de montagne. Cet espace connait une régression de plus de 31.000
ha par an, perte devant s’accentuer d’avantage en raison de l’accroissement des épidémies parasitaires, des incendies, de la pression sur les parcours, des défrichements et des prélèvements de bois de feu.
Le changement climatique risque aussi de compromettre les progrès réalisés en matière de lutte contre des maladies infectieuses comme le paludisme et le choléra. Les phénomènes extrêmes, vagues de chaleur ou de froid, ne manqueront pas
non plus d’affecter les populations vulnérables, particulièrement les plus pauvres, les nourrissons et les personnes
âgées. L’incidence des maladies chroniques
(asthme, rhumatisme, grippes, etc.) pourrait sensiblement augmenter. D’autres maladies comme les maladies respiratoires et celles à transmission vectorielle et hydrique risquent
également d’être aggravées.
Face au changement climatique, le Maroc a
élaboré un plan national qui vise la consolidation des stratégies sectorielles en matière d’atténuation des GES et d’adaptation aux changements climatiques.
Dans ce cadre :
* une priorité est donnée aux énergies renouvelables à travers de grands chantiers relatifs aux énergies solaire et
éolienne.
* pour le renforcement des infrastructures hydrauliques, le Plan d’action 2010-2030 vise la réalisation de 59 grands barrages et d’un millier de petits et moyens barrages. Ce programme sera renforcé par la réutilisation des eaux usées et le développement d’usines de dessalement de l’eau de mer utilisant l’énergie solaire ou éolienne. Il est envisagé également le transfert d’eau du nord au sud.
* en matière de prévention des risques, la stratégie prévoit le renforcement du Plan
National de Protection Contre les
Inondations. Un Fonds National de Lutte
Contre les Effets des Catastrophes
Naturelles a été institué en 2009. Ces actions sont complétées par la mise en place d’un Système d’Alerte Précoce à la
Sécheresse et par un projet de plantation d’un million de palmiers dattiers à l’horizon 2015 et 2, 9 millions à l’horizon
2030.
* le Plan Directeur de Reboisement vise la plantation d’un million d’ha sur la période
2015-2030.
* le Plan Maroc Vert prévoit des mesures d’adaptation, en particulier l’économie d’eau, la préservation des sols, la promotion de l’arboriculture et l’appui à l’agriculture solidaire autour des produits de terroir.
* l’Initiative Nationale de Développement
Humain (INDH) inscrite dans le cadre des objectifs du Millénaire, cible l’atténuation de la pauvreté et la précarité à travers la promotion d’AGR et l’amélioration de l’accès aux services sociaux.
TABLEAU 1. Prédictions des changements des températures et précipitations moyennes à l’horizon 2045 et 2075, par région géographique au Maroc.
ORIENTAL NORD CENTRE SUD
T moyenne de 1960-1990
2045
2075
A1B
B2
A1B
B2
P moyenne de 1960-1990
2045
A1B
B2
2075
A1B
B2
17.1
19.2
19.2
21.0
20.4
140
118
122
117
115
19.3
21.0
21.0
22.4
21.9
720
623
634
567
589
17.6
19.4
19.4
22.0
20.4
236
197
204
190
190
20.1
21.7
21.7
23.0
22.5
59
54
53
45
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APPROCHE ET ACTIONS POUR LA RÉSILIENCE AU CHANGEMENT CLIMATIQUE
PLANIFICATION
DE LA RESILIENCE
Ce chapitre présente le processus de planification de la résilience dans le site du
Projet SEARCH au Maroc. Il commence par l’approche participative qui a été utilisée à différents niveaux d’intervention.
Le cycle de planification participative qui a permis d’aboutir aux actions adaptatives est explicité après description du site d’action et ses unités socio-écologiques.
Conformément au cycle de planification participative adopté, les méthodes et résultats des étapes de l’élaboration de la vision de la résilience, d’évaluation de la vulnérabilité et de développement des stratégies sont alors successivement documentés. L’objectif est de fournir les bases qui justifient le choix des actions pratiques sélectionnées dans le chapitre suivant.
Approche participative
Tout individu ou groupe ayant des intérêts de valeur (matérielle ou non) qui peut être affecté par le changement climatique ou par les actions entreprises pour anticiper des risques climatiques est considéré partie prenante. Les parties prenantes peuvent être des décideurs, des communautés ou des gestionnaires dans les zones sous risque climatique effectif ou potentiel. En fonction des problèmes et des objectifs, certaines parties prenantes sont plus affectées ou plus influentes que d’autres.
Figure 2. Echelle de participation des parties prenantes.
L’implication de toutes les parties prenantes dans le processus de l’élaboration, de la décision et de l’adoption des stratégies est extrêmement importante pour aboutir à des alternatives et des solutions durables. Cette implication peut aller de la simple information au partenariat, en passant par la consultation et la participation effective des parties prenantes (Fig. 2). Pour aboutir
à l’auto-mobilisation autour des objectifs, les différentes parties prenantes doivent
être organisées en réseaux d’intérêts mutuels.
La constitution de réseaux entre les parties prenantes ou réseautage est un processus d’apprentissage très précieux.
Dans ce processus, les parties prenantes sont égales, ce qui facilite la prise des décisions et l’émergence de nouvelles solutions. L’innovation représente ainsi une capacité collective car elle permet d’améliorer la qualité de la prise des décisions stratégiques par la communication adéquate et la coopération efficace.
L’évolution et la réussite du processus participatif nécessite la constitution d’un noyau de facilitation capable de jouer le rôle de catalyseur pour mobiliser d’autres parties prenantes afin de réaliser les objectifs. Dans le cadre du Projet SEARCH, une équipe poly-disciplinaire a été constituée pour assurer cette fonction. Ladite équipe est présentée ci-dessous au sein du chapitre consacré aux actions pilotes.
(aménagement agricole, forestier et hydrique) et pauvre en infrastructures et en équipements ;
– présence de signes évidents de vulnérabilité socioéconomiques
(pauvreté, exode, …) et écologiques
(érosion, glissement de terrain…) ;
– présence de divers activités et programmes sectoriels de plusieurs partenaires et intervenants ;
– élus et Conseil Communal dynamiques et collaboratifs ;
– populations rurales dotées de structure d’organisation (association, coopérative,
…) et prêtes à la participation.
Ce bassin est situé au sud de Tétouan en amont du barrage de Martil encore en cours de construction (Fig. 3). Il est délimité par les coordonnées N35°14'45" - N35°26'55",
W5°22'30" - W5°34'12". Il a une superficie de 223 km
2 et abrite une population d’environ 11642 habitants en 2004 (dernier recensement), actuellement estimée à plus
Description du site du projet SEARCH
C’est le bassin hydrique de l’Oued El Kebir qui a été choisi comme site pilote, en prenant en considération divers critères relatifs à ses atouts et ses vulnérabilités.
Les critères adoptés pour sélectionner ce site sont les suivants :
– bassin hydrique nécessitant un aménagement territorial intégré
Figure 3. Position du Bassin de Oued El Kebir à l’extrême Nord-Ouest du Maroc.
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APPROCHE ET ACTIONS POUR LA RÉSILIENCE AU CHANGEMENT CLIMATIQUE
Figure 4. Position du Bassin de Oued El Kebir sur la carte des Collectivités territoriales au Sud de Tétouan.
de 14500. Il comprend cinq Communes
Rurales appartenant à la Province de
Tétouan (Bni Leit, Al Hamra, Zinat, Bni idder et Sahtriyine) et une commune rurale
Tazroute qui relève des compétences de la
Province de Larache (Fig. 4).
L’écoulement des eaux du réseau hydrographique du bassin se fait du sud vers le nord ; du sommet de Jbel
Bouhachem jusqu’à la station météorologique Chibech. Le point culminant est situé au sommet du Jbel
Bouhachem reconnu par sa richesse et sa diversité biologique. L’ensemble du bassin fait partie du territoire de la Réserve de
Biosphère Intercontinentale de la
Méditerranéenne (RBIM). Dans ce bassin, l’altitude varie de 96 m à 1640 m sur une longueur d’environ 20 kilomètres. La lithologie est constituée de grès (41%), flyschs (38%) et argiles (14%). Le climat est subhumide à perhumide à hivers tempérés à froids. La couverture végétale est formée de forêts naturelles (29,5%), de matorrals (20,5%) et de plantations forestières (4,7%), alors que l’agriculture occupe 45% de l’aire du bassin.
Le bassin Oued El Kebir comprend deux types d’unités socio - écologiques : des unités agro - forestières et des unités agricoles (Fig. 4). Pour identifier ces unités, le site a été subdivisé en aires homogènes autour des douars. Les informations relatives aux milieux physique et humain ont été recueillies pour chaque aire à partir de la base de données du Système d’Information Géographique établie pour le site par SEARCH. Ces informations ont été soumises à des analyses multivariées 7 ayant permis l’identification des deux types d’unités socio-écologiques considérées.
Répartis de part et d’autre du grand axe
(sud - nord) du réseau hydrique, le type agro-forestier occupe la rive gauche et le type agricole s’étend sur la rive droite et l’aval du bassin. Le premier est dominé par des roches gréseuses et par un important couvert forestier. Le second, dominé par des flyschs et à couvert végétal faible, est exposé à des phénomènes d’érosion hydrique et des glissements de terrains. Sur le plan social, le taux de pauvreté et d’analphabétisme sont plus prononcés dans les unités agricoles mais l’ensemble des communautés du bassin est très vulnérable.
La figure 5 illustre l’occupation des sols dans les deux unités socio-écologiques par des photographies aériennes actuelles.
A travers le temps, les systèmes agroforestiers se sont mis en place par l’activité humaine au dépens de l’écosystème forestier naturel 8 . L’extension de l’agriculture entraine la disparition du couvert naturel et l’apparition de socio-
7 Analyse des Composantes Principales et Analyse Canonique des Correspondances. Pour plus d’information sur l’identification des unités socio-écologiques : https://cmsdata.iucn.org/downloads/analyse_vulnera_search_oct_2012_lowres.pdf
8 L. TAIQUI et C. MARTIN, 1997. Eléments historiques d’analyse écologique des paysages montagneux du Rif occidental (Maroc).
Mediterranea, Serie de Estudios Biológicos, 16 : 23-35.
Figure 5. Images aériennes exemples d’unités socio-écologiques du Bassin : à gauche, type agro-forestier ; à droite : type agricole.
écosystèmes agricoles. Au bout d’un certain temps, les espaces agricoles deviennent dégradés par l’érosion. Sans restauration écologique, le système court le risque de la désertification. La figure 6 illustre cette succession et montre la proximité du système agricole du seuil de basculement irrécupérable vers le désert.
Système forestier naturel Système Agro-forestier
Forêt
Matorral
Cultures extensives
Cultures intensives
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Restauration écologique Système Agricole
Désertification Dégradation du système
Figure 6. Modèle schématique de la dynamique des socio-écosystèmes du Rif marocain.
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APPROCHE ET ACTIONS POUR LA RÉSILIENCE AU CHANGEMENT CLIMATIQUE
Figure 7. Cycle de planification participative.
Cycle de planification participative
L’évaluation, l’élaboration des stratégies, l’implantation et la réévaluation constituent des étapes fondamentales du processus cyclique de la planification. Pour le projet
SEARCH 9 , le cycle de planification participative adopté (Fig. 7) vise le renforcement des composantes de la résilience par un processus continu d’organisation, participation, expérimentation, adaptation et apprentissage. Il s’agit à la fois de tester des techniques appropriées, de chercher des solutions adéquates et de créer une culture de bonne gouvernance.
Selon le cycle de planification adopté par
SEARCH , la première phase d’élaboration d’une vision future partagée est basée sur une identification participative des problèmes et leur analyse. La deuxième phase concernant l’évaluation de la vulnérabilité socio - écologique est fondée sur la collecte et le partage d’informations nécessaires qui serviront aussi à d’autres activités destinées au développement des stratégies et à l’élaboration du plan final.
Ces deux phases du processus de planification et de prise de décision sont décisives et déterminantes quant à la qualité des résultats. Les autres phases du cycle permettent d’explorer la capacité adaptative du système et l’apprentissage collectif par la démonstration, l’action et la rétroaction.
Face à l’incertitude, l’analyse des scénarii est cruciale pour réussir la liaison appropriée entre la vision et la mise en place de stratégies. Il s’agit en fait d un outil à déployer à maintes reprises pour identifier les stratégies d’atténuation de la vulnérabilité et de renforcement de la capacité adaptative. Il offre une base pour prioriser les stratégies et implanter les plans répondant le mieux à la vision initiale de la résilience.
De manière générale, l’utilisation du cycle doit être flexible car le passage d’une
étape à une autre s’effectue dans les deux sens. Le retour d’une étape à la précédente est souvent indispensable pour améliorer le résultat. Le succès du processus de planification dépend des conditions suivantes :
– une définition claire des problèmes et par conséquent de la vision à long terme pour les résoudre. C’est la vision qui oriente et conditionne les étapes successives du processus de planification.
– une évaluation correcte de la situation exige la création d’une base de données acceptée et partagée entre toutes les parties prenantes. La base de données n’est pas nécessairement exhaustive pour l’identification participative des problèmes ou la prise d’une décision optimale.
9 MORLARTY P., BATCHELOR CH., ABD-ALHADI F. T., LABAN P. & FAHMY H., 2007. The EMPOWERS approach to water governance: guidelines, methods and tools. INWRDAM, Jordan. http://www.empowers.info/page/2850.
– il y a plusieurs options pour atteindre une vision donnée. Le choix entre les options est une décision politique collective; l’approche participative constitue un appui au processus politique et ne le substitue en aucun cas.
– puisque les différentes options comportent des risques variés, l’enjeu de la planification effective réside dans la réduction et l’atténuation de ces risques à moyen et à long terme.
– l’opinion des communautés locales et les droits des plus défavorisés doivent
être respectés dès le début et durant tout le processus de planification.
– le cycle de planification participative est, ainsi, une approche de gestion adaptative qui s’avère particulièrement efficiente en présence d’incertitudes multiples et au cas où l’information est incomplète ou douteuse.
Analyse des parties prenantes
La méthode RAAKS 10 (
Rapid Apparaisal of
Agricultural Knowledge System ou l’Evaluation Rapide de Systèmes de
Connaissance Agricoles) préconise que les solutions techniques sont nécessaires mais ne sont pas suffisantes pour l’innovation adéquate des pratiques. Les objectifs du développement agricole durable représentent eux-mêmes une partie du problème. L’identification et la formulation du problème demandent autant d’intérêt et d’effort que l’élaboration de la solution.
D’autant plus, les solutions des problèmes doivent être développées et ajustées entre plusieurs acteurs qui ne sont pas nécessairement des scientifiques, techniciens ou agriculteurs. Les femmes rurales, les consommateurs, les gestionnaires doivent aussi participer dans l’identification et la résolution des problèmes. Ces acteurs sociaux sont reliés dans un réseau de relations à la recherche de l’innovation adaptée de leurs pratiques.
La méthode RAAKS permet aux parties prenantes d’identifier ces relations et d’assumer leurs rôles dans la recherche d’innovations et de solutions concrètes.
Dans la pratique, RAAKS est une approche flexible qui offre une variété de perspectives qui peuvent être adaptées au cycle de planification. L’évaluation rapide des systèmes de communautés agricoles comprend trois étapes : (I) l’étape de définition du système et ses problèmes, (II) l’étape d’analyse des opportunités et des contraintes et (III) l’étape d’articulation de l’analyse politique.
La définition du système se réfère à l’analyse des parties prenantes. Cette analyse consiste à identifier les institutions, les groupes ou les personnes susceptibles d’affecter ou d’être affectés par le changement climatique ou par le processus de prise de décision. Une telle analyse est indispensable pour mieux cibler les partenaires, stimuler leur participation, promouvoir leur coopération et faciliter le partage de l’information en matière de résilience face au changement climatique.
Dans le cadre du Projet SEARCH, cette analyse a été menée par l’équipe de facilitation lors de plusieurs ateliers. Les parties prenantes principales ont été identifiées après avoir dressé l’inventaire des intervenants potentiels à différents niveaux. La liste finale des parties prenantes principales a été dressée en fonction de leurs rôles, responsabilités, intérêts et effets sur la gestion des ressources naturelles. Cette liste n’est pas définitive puisque le processus d’analyse
15
10 http://www.kit.nl/kit/RAAKS-multi-stakeholder-learning-in-agricultural-innovation-systems-In-depth
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APPROCHE ET ACTIONS POUR LA RÉSILIENCE AU CHANGEMENT CLIMATIQUE
A) B)
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Technique de « l’arbre des problèmes" (A) et calendrier climatique (B)
à l’échelle du Bassin Oued El Kebir. Il s’avère que la relation des populations locales avec les ressources naturelles est beaucoup plus importante que celle des autres parties prenantes, alors que la relation des associations locales est la plus faible. Le renforcement de capacités de ces deux parties prenantes est nécessaire pour atténuer la pression des populations locales sur les ressources naturelles et améliorer leur auto-organisation.
Figure 8. Importance relative des parties prenantes par rapport aux ressources naturelles.
des parties prenantes est un processus dynamique et continu.
La figure 8 représente l’importance relative des principales parties prenantes identifiées
Vision
Les problèmes liés au changement climatique et au développement durable sont complexes. Pour surmonter cette complexité, il est indispensable d’identifier le problème central et de distinguer les causes des conséquences. La technique de
« l’arbre des problèmes »
11 commence par identifier le problème focal ou central parmi les problèmes évoqués par les participants.
11 Demante, M.J. 2007. Renforcement des capacités des acteurs du développement local et de la décentralisation - T6 : Définir les objectifs et les actions. Iram, 16p. Eléments de méthode pour la planification locale. http://www.iram-fr.org/pdfpublications/431.pdf
Figure 9. Arbre des problèmes du Bassin Oued El Kebir élaboré lors de l’atelier participatif du 25 avril 2012.
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APPROCHE ET ACTIONS POUR LA RÉSILIENCE AU CHANGEMENT CLIMATIQUE
Le problème central prend alors la position du tronc d’un arbre. Les autres problèmes sont ensuite répartis entre les racines et les ramifications de l’arbre, selon leurs relations directes. Les racines correspondent aux causes du problème central et les ramifications traduisent ses effets.
L’identification du problème central ouvre la voie à l’élaboration d’une vision commune. Afin de résoudre le problème principal et concrétiser la vision, les racines de l’arbre (causes du problème) deviennent les objectifs du plan d’action.
La figure 9 illustre l’arbre des problèmes développé par les parties prenantes à l’échelle du bassin.
L’analyse des problèmes de l’ensemble du Bassin et au niveau des douars, à l’aide de la technique de « l’arbre des problèmes », permet de construire une vision composée. Elaborée par l’atelier à l’échelle du Bassin, la vision stratégique est
la mise en œuvre d’une gestion durable des ressources naturelles, à
moyen et à long terme. La réalisation de cette vision doit intégrer les visions des populations locales des différents douars en fonction de leurs particularités et de leurs préoccupations. Dans les unités agro – forestières (Douar Tazia, CR
Tazroute), l’accent est mis sur
l’amélioration de la productivité des terroirs par le développement de
l’irrigation et la protection des sols. Alors que dans les unités agricoles (Douars
Ifartan et Isrifen, CR Beni Leit), l’urgence est d’assurer
la disponibilité de l’eau potable et l’amélioration du réseau
routier. Ces visions modestes des populations du Bassin exigent une panoplie d’actions pour réduire les vulnérabilités actuelles et permettre ainsi d’assurer des conditions de vie décentes et plus résilientes.
Pour intégrer les préoccupations des douars et du bassin avec d’autres préoccupations à l’échelle de la Région
Tanger Tétouan et de l’ensemble des aires montagneuses du Nord Ouest du
Maroc, l’équipe SEARCH a abouti à la vision générale suivante : «
A l’horizon
2025, tous les villages ont accès à l’eau potable et aux routes. Les ressources naturelles sont gérées de façon durable et de nouvelles activités d’économie verte sont créées. Le plan climat pour l’atténuation et l’adaptation au changement climatique dans la région est fonctionnel et il est articulé avec les plans
communaux de développement résilient ».
Identification des problèmes avec les groupes cibles
Evaluation de la vulnérabilité
Prédictions du changement climatique au niveau local
Dans le cadre du Projet SEARCH, l’outil statistique de réduction d’échelle SDSM a
été utilisé dans le but de produire des scénarios futurs de changements climatiques
à haute résolution pour les paramètres température moyenne et précipitations. Dans cette perspective, trois types de données ont
été employés, à savoir, des observations locales, des ré-analyses à basse résolution provenant du NCEP (Centre National de
Prédiction Environnementale, Royaume Uni) et des scénarios de changements
climatiques à basse résolution du modèle anglais HadCM3.
Les scénarios de changements climatiques futurs à haute résolution obtenus s’avèrent similaires à ceux du quatrième rapport du GIEC. En fait, le calcul des anomalies des deux paramètres
étudiés, du climat futur par rapport au climat actuel (1961-2000), montre une augmentation des températures et une diminution des précipitations pour les horizons 2020, 2050 et 2080. Le scénario
A2 prévoit un réchauffement d’environ
1.6°C à l'horizon 2050 et d’environ 3,1°C à l'horizon 2080. Pour le scénario B2, le réchauffement serait de 1,5°C à l’horizon
2050 et de 2,2°C à l’horizon 2080. En ce qui concerne les précipitations, la diminution serait de 26% pour A2 et de
22% pour B2, à l’horizon 2050. A l’horizon
2080, la diminution serait de 45% (A2) et de 35% (B2). A noter que ce réchauffement et cette diminution des précipitations seraient accentués respectivement en été et au printemps
(Fig. 10, 11).
Ces changements climatiques augmenteraient sans doute la pression sur les ressources hydriques et des modifications profondes du cycle de l’eau.
D’autant plus, les évènements extrêmes qui caractérisent la région, tels que l’alternance des périodes de sécheresse et des
épisodes pluvieux et orageux accompagnés de vents violents. Les crues torrentiels et les glissements de terrain ont tendance à s’aggraver. La santé humaine, l’environnement et l’ensemble des secteurs socio-économiques seraient inévitablement exposés à des impacts forts.
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Figure 10. Anomalie saisonnière et annuelle (en °C) de la température moyenne au niveau du bassin hydrique Oued
El Kebir pour les deux scénarios A2 et B2 et pour les trois horizons futurs 2020 (2011-2040), 2050(2041-2070) et
2080(2071-2099) par rapport à la période 1961-1990.
Figure 11. Le changement en pourcentage au niveau des cumuls saisonniers (hiver, printemps et automne) et annuels des précipitations pour les trois horizons futurs
2020, 2050 et 2080 et pour les deux scénarios A2 et B2 au niveau du bassin hydrique Oued El Kebir.
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APPROCHE ET ACTIONS POUR LA RÉSILIENCE AU CHANGEMENT CLIMATIQUE
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Matrice de vulnérabilité
Dans le cadre du Projet SEARCH, l’évaluation participative de la vulnérabilité au changement climatique a été effectuée en utilisant l’outil CRiSTAL 12 et la méthode
CVCA
13
. L’outil CRISTAL utilise Microsoft
Excel comme support pour enregistrer et résumer les données collectées des ateliers participatifs sur les ressources et moyens de subsistance, sur les risques climatiques et leurs impacts, sur les stratégies adaptatives et leur faisabilité. Il a été utilisé auprès de groupes homogènes en fonction de l’âge et du genre (Douar Hmamiouech, CR Zinat). La méthode CVCA permet d’examiner les risques, leurs impacts, les stratégies actuelles d’adaptation, l’efficacité de ces stratégies, les alternatives et leurs conditions de réalisation (Tableau 2). Il a
été employé à l’échelle de douars, séparément avec des femmes et des hommes (Tazia, Douars Lahyout), et dans l’atelier du comité du bassin.
La vulnérabilité des populations du bassin est marquée par leur dépendance des ressources naturelles. Ces ressources sont largement affectées par les risques climatiques et épuisées par la surexploitation. La vulnérabilité varie en
12 IIDD, IUCN & SEI-US, 2009. CRISTAL. Manuel d’utilisation. Version 4. URL http://www.iisd.org
13 CARE, 2009. CVCA Handbook. URL : http ://www.careclimatechange.org
TABLEAU 2. Matrice de vulnérabilité des Douars Lahyout.
RISQUES
CLIMATIQUES
SÉCHERESSE
IMPACTS
– Manque d’eau potable et d’abreuvage
– Manque d’eau d’irrigation
– Faibles ressources fourragères
– Mortalité du bétail
EROSION
– Dégradation du sol
– Diminution des rendements agro-pastoraux
– Envasement des barrages
AUTRES CAUSES
NON
CLIMATIQUES
– Absence d’entretien des sources
– Absence de puits
– Absence de stockage d’eau
– Pentes fortes
– Manque d’arbres
– Absence de terrasses antiérosives
Présence de haies vertes de lentisque
STRATÉGIES
ADAPTATIVES
ACTUELLES
– Recherche d’autres sources non asséchées
– Utilisation d’animaux de traits pour la recherche d’eau
EFFICACITÉ DES
STRATÉGIES
ACTUELLES
Relative contre la soif
STRATÉGIES
ADAPTATIVES
ALTERNATIVES
– Alimentation des foyers à partir du barrage
– Aménagement des sources et puits
– Utilisation de techniques de captage et stockage de l’eau
CONDITIONS DE
RÉALISATION
– Répartition équitable des ressources financières publiques
– Expertise technique
– Décision des autorités compétentes
– Plaidoyer
Relative à cause de la négligence
– Extension des terrasses en haies et en pierres et emploi de banquettes antiérosives
– Plantation d’arbres fruitiers
– Instauration d’une solidarité entre l’amont et l’aval du bassin
– Expertise technique
– Appui des autorités fonction du genre et de l’âge des groupes consultés ; les femmes âgées sont les plus vulnérables suivies par les filles qui montrent plus de dynamisme lorsqu’elles arrivent à s’organiser en association ou coopérative. Les hommes, en particulier les plus âgés, s’occupent de la gestion de la propriété et du bétail. Les jeunes hommes, quant à eux, sont souvent à la recherche de ressources financières en pratiquant des cultures illicites de
Cannabis ou en travaillant ailleurs.
Les impacts liés aux risques climatiques
évoquées par les populations et les partenaires sont variés, les plus importants sont relatifs au manque d’eau, à l’érosion et aux glissements de terrain. Les actions adaptatives utilisées
(terrasses, haies vertes…) traduisent un
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APPROCHE ET ACTIONS POUR LA RÉSILIENCE AU CHANGEMENT CLIMATIQUE
savoir faire écologique traditionnel qui risque, malheureusement, de disparaître
à cause d’une certaine acculturation négative.
Scenarios, stratégies et planification adaptative
L’élaboration de scénarios a été réalisée, après évaluation de la vulnérabilité, dans deux ateliers : le premier avec la participation des parties prenantes du bassin versant et des responsables régionaux, le second en présence de membres représentant trois communautés locales (Tazia, Lahyout et Hmamiouech). Le but de ces ateliers participatifs était d'identifier les facteurs pouvant influencer la réalisation de la vision, de les classer en fonction de leur importance et incertitude, et d'élaborer des stratégies.
Pour atteindre "la gestion durable des ressources naturelles" au niveau du bassin versant, les facteurs à prendre en considération sont:
• la capacité d'adaptation
• la sensibilisation et la participation des communautés locales
• l’infrastructure
• l'application des lois environnementales et des politiques
• la pauvreté et la vulnérabilité sociale
• la disponibilité des moyens financiers
• la transparence dans les processus de prise de décision et de gestion
• la gouvernance
• la coordination multipartite
• le changement climatique
• l’accès à l'information
• la responsabilisation
Parmi ces facteurs, les plus importants et moins certains sont « l’application des lois et des politiques » et « la disponibilité des moyens financiers ». Quatre scénarios sont ensuite déduits en combinant les situations extrêmes de présence ou absence de ces facteurs dans l'avenir.
Après examen des résultats des quatre
combinaisons, le scénario correspondant
à « l'application des politiques et des lois et la disponibilité des ressources financières sont assurées » a été choisi comme le scénario le plus probable. Ce scénario a conduit au choix des stratégies suivantes pour le bassin :
− renforcement des capacités d'adaptation
− développement des infrastructures
− conservation des forêts et protection des sols
− diversification des sources de revenus
− promotion de l’économie verte
Au niveau communautaire, la vision partagée était d’assurer « l'accès à l'eau potable ». Comme pour le bassin, les facteurs les plus importants mais très incertains sont « la responsabilisation des services publics » et « la disponibilité de ressources financières ». Les stratégies issues du scénario le plus probable correspondant à la combinaison positive de la responsabilisation et de la disponibilité de financement dans l'avenir sont :
− développement de l'infrastructure routière
− adduction de l'eau potable
− diversification de la production agricole
− amélioration des services publics
− développement des sources de revenus
La combinaison des différentes propositions élaborées par les deux ateliers permet de définir quatre axes stratégiques.
Classés selon une priorisation basée sur des critères socio-économiques, environnementaux et techniques
14
, ces axes sont ordonnés ainsi :
1. Conservation des forêts et protection des sols
Le défi majeur de la résilience des socio-
écosystèmes des montagnes du Nord du
Maroc réside dans la durabilité du système forestier. Cela signifie d’une part, la
14 IUCN-ROWA, 2014. A guiding toolkit for increasing climate change resilience. 66p.
https://cmsdata.iucn.org/downloads/iucn_report__3_.pdf
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APPROCHE ET ACTIONS POUR LA RÉSILIENCE AU CHANGEMENT CLIMATIQUE
conservation et gestion durable des forêts et, d’autre part, la restauration ou réhabilitation des terrains dégradés. Dans ce sens, les stratégies adaptatives englobent diverses actions, en particulier l’épuration du foncier, la diminution de la pression sur la forêt et la gestion participative (ressources, risques, aires protégées).
Quant à la conservation des sols agricoles, le savoir traditionnel est riche en pratiques de lutte contre l’érosion hydrique. Ce savoir est malheureusement menacé, raison pour laquelle il faut le valoriser et l’accompagner par d’autres actions telles que l’extension des aménagements hydrauliques et la promotion de pratiques culturelles adéquates.
Néanmoins, l’enjeu capital pour la résilience au changement climatique réside dans le renforcement des capacités des communautés locales et des collectivités territoriales pour la gouvernance des
écosystèmes et de la biodiversité.
2. Renforcement des capacités d'adaptation
Cette stratégie est déterminante pour renforcer la composante « autoorganisation » de la résilience. Elle comprend la gouvernance et l’ensemble des processus de planification et de prise de décision. Dans ces processus, la facilitation joue un rôle important pour favoriser la concertation et le dialogue entre les parties prenantes. Pour aboutir à une planification territoriale participative, la stratégie de renforcement des capacités adaptatives doit privilégier l’organisation des communautés locales et l’implication des femmes et les catégories sociales les plus vulnérables.
La mobilisation des populations locales ne peut être durable que par la diversité des activités économiques et l’amélioration des revenus.
3. Diversification des sources de revenus et promotion de l’économie verte
L’amélioration des sources de revenus dans le milieu rural ne peut être assurée que par l’augmentation de la productivité des agro-systèmes. Dans le cas des zones montagneuses, la promotion des produits
à forte valeur ajoutée constitue un levier important de l’économie verte. La durabilité de telle économie dépend de la valorisation des produits de terroir, de la conservation des ressources génétiques locales et de la réintroduction des pratiques traditionnelles abandonnées. Le succès de cette stratégie est tributaire de la mise en place de procédés de transformation et de valorisation des produits agro-forestiers et artisanaux. La stratégie doit intégrer aussi la structuration des filières des différents domaines d’activités afin d’organiser les marchés et assurer la transparence et l’équité. La labellisation des produits des filières et leur
éventuelle certification sont également importantes pour faciliter l’accès au marché et la fidélisation de la clientèle.
L’ensemble des composantes de cette stratégie dépend étroitement de la mise en place d’une infrastructure durable et adéquate.
4. Développement des infrastructures et services publics
Cette stratégie nécessite d’abord le désenclavement et la mise en place d’un réseau routier et des moyens de transport pour assurer la mobilité et les échanges.
L’implantation et la mise à niveau des services sociaux, en particulier éducatifs et de santé, sont aussi primordiales pour le développement humain. La généralisation du réseau de l’eau potable est aussi vitale
à la fois pour le développement
économiques et l’amélioration des conditions de vie. D’autres infrastructures hydrauliques sont également à développer pour diversifier les moyens de mobilisation des ressources hydriques disponibles.
La durabilité de ces infrastructures ne peut
être garantie que par un aménagement territorial intégré qui prend en considération la préservation des ressources naturelles et la pérennité des services écosystémiques.
La partie suivante a pour objectif de faire connaître des actions pouvant servir à la réalisation des axes stratégiques décrits ci-dessus. Elle comporte des actions pilotes réalisées dans le cadre du projet
SEARCH et d’autres bonnes pratiques déployées dans le Rif marocain et dans d’autres zones méditerranéennes.
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APPROCHE ET ACTIONS POUR LA RÉSILIENCE AU CHANGEMENT CLIMATIQUE
ACTIONS PILOTES
Facilitation
L’identification d’une vision commune de la résilience, l’évaluation de la vulnérabilité, le développement de stratégies adaptatives, la planification et l’exécution des actions sont le résultat d’un travail participatif coordonné par une équipe de facilitation. Dans le cas du
Projet SEARCH, cette équipe comprenait des représentants de l’Université
Abdelmalek Essaâdi de Tétouan (UAE), de l’Association Talassemtane pour l’Environnement et le Développement
(ATED), de l’Agence du Bassin
Hydraulique du Loukkos (ABHL), de la
Direction Régionale de l’Agriculture
(DRA), de la Direction Régionale des
Eaux et Forêts et Lutte Contre la
Désertification du Rif (DREFLCD Rif) et de l’Institut des Techniciens Spécialisés de l’Agriculture de Ben Karrich (Tétouan).
Cette équipe poly-disciplinaire s’est dotée d’une charte de travail qui a été rigoureusement respectée du début à la fin du projet. Elle a bénéficié des ateliers de formation organisés pour les partenaires des cinq pays arabes impliqués dans le projet SEARCH. Les méthodologies et les outils adoptés dans ces ateliers ont été déployés dans les ateliers participatifs organisés et animés par cette équipe à différents niveaux :
– les populations locales des douarscibles,
– les élus des communes rurales et représentants administratifs qui constituent le comité du bassin,
– les responsables des services publics à l’échelle de la Région Tanger Tétouan qui constituent le comité de pilotage du projet
: le Président de l’UAE, le Président d’ATED, le Directeur régional de la Santé
Publique, le Directeur régional de la DRA, le Directeur Régional de la DREFLCD Rif, le Directeur de l’ABHL et le Directeur régional de l’Observatoire Régional de l’Environnement et du Développement
Durable.
Figure 12. Niveaux d’intervention de l’équipe SEARCH.
Le long du processus de projet, l’équipe a assuré le rôle d’échange d’idées, de données et de connaissances entre ses propres membres et entre les différentes parties prenantes ciblées. La diversité de l’équipe et les compétences individuelles de ses membres sont les principaux atouts qui ont permis de mener à bien le processus d’apprentissage collectif.
Planification participative
La planification territoriale permet de développer une vision stratégique du développement territorial aux niveaux
économique, social, environnemental et culturel. Cette vision doit intégrer l’harmonisation des différents usages du territoire, en prenant en considération les contraintes naturelles et humaines. Au
Maroc, les PCD lancés en 2009 représentent une première étape vers la planification participative au niveau des collectivités territoriales. La planification du développement territorial initiée a certainement besoin de temps et d’efforts pour aboutir à l’ancrage et l’appropriation par les acteurs locaux. Elle a besoin aussi
ETAPE 1
Elaboration de la vision initiale et caratérisation du territoire
1. Analyse de la situation - RIDA
2. RAAKS et PRA
3. Arbre des problèmes
ETAPE 2
Evaluation de la vulnérabilité
• CRiSTAL
• CVCA
• Vulnérabilité écologique
• Approche durable des moyens d'existence
ETAPE 3
Développement des stratégies adaptatives
1. Atelier d'analyse et raffinement de la vision et d'élaboration des scénarios
2. Atelier d'analyse des scénarios
3. Atelier d'élaboration des stratégies détaillées
ETAPE 4
Planification
1. Atelier de Planification
2. Priorisation
3. Développement de Plans d'Action
ETAPE 5
Implantation
1. Projets pilotes
2. Analyse des droits et responsabilisation
ETAPE 6
Réflexion
1.Création de plateforme des parties prenantes à différents niveaux
2.Processus de documentation
3. Gestion et communication de l'information, des connaissances
4. Suivi, évaluation et feedback
Figure 13. Cycle de planification participative et outils utilisés par SEARCH.
Centre de Coopération pour la Méditerranée de l’UICN
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APPROCHE ET ACTIONS POUR LA RÉSILIENCE AU CHANGEMENT CLIMATIQUE
A)
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B)
A) Formation des femmes en classe. B) Femmes en atelier participatif.
de renforcement de capacités et d’intégration de la dimension environnementale dans les préoccupations socio-économiques. Dans ce sens, les recommandations du Département de l’Environnement (Projets oasis résilients et
CB2) avec le soutien du PNUD constituent des contributions importantes pour redresser la situation et anticiper les réponses adaptatives.
La boîte à outils (Toolkit) élaborée par
SEARCH constitue également une référence importante et appropriée de méthodologies et instruments de planification participative. Aujourd’hui, le développement socio-économique et la préservation des biens et services
écosystémiques passent désormais par la bonne gouvernance et l’intégration du changement climatique dans la planification et le développement des territoires.
concertation et de coopération avec d’autres institutions ; il ne se limite pas à un processus de changement des mentalités et des comportements individuels.
Dans le cadre du Projet SEARCH, le renforcement des capacités a été assuré
à différents niveaux tout au long du projet. Un programme de renforcement de capacités autour des PAM a été développé, en particulier, pour une coopérative rurale de femmes (Encadré
2). Pour les paysans, l’équipe de facilitation a initié la constitution d’une association agricole qu’elle a accompagnée pour bénéficier des actions d’arboriculture programmées au cadre du Plan Maroc Vert.
Organisation des communautés locales
Le renforcement des capacités est un processus de changement des comportements des individus, d’amélioration des performances d’organisation et de coordination des institutions et de création d’environnements propices à la bonne gouvernance du développement. Les populations rurales souffrent d’un déficit
énorme en aptitudes à la participation au développement et interpellent les acteurs de développement pour améliorer leurs connaissances et performances. La vulnérabilité des populations rurales est accentuée chez la femme par son faible accès à l’information, son rôle limité dans la prise de décision et sa mobilité restreinte. Cependant, le renforcement des capacités nécessite l’appui à l’organisation des populations et à l’acquisition des performances de
Captage des eaux pluviales
La disponibilité des ressources hydriques est liée, en plus des précipitations, à la lithologie du terrain. Le climat méditerranéen est caractérisé par une sécheresse estivale qui peut être aggravée par l’absence de réserves souterraines.
Dans cette situation, le recours au captage des eaux pluviales est une pratique traditionnelle répandue dans les milieux semi-arides et arides. Dans les zones à pluviométrie importante, cette pratique est peu connue. Aujourd’hui, dans une situation de croissance accrue de la demande en eau, le captage des eaux de pluie s’avère une alternative adéquate dans un contexte de pénurie liée au changement climatique.
La collecte des eaux pluviales est d’ailleurs, l’une des actions décidées par les ateliers participatifs du Projet SEARCH.
Elle répond partiellement à la « stratégie de développement des infrastructures et services publics ». Le procédé technique réalisé par SEARCH est présenté dans l’encadré suivant.
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APPROCHE ET ACTIONS POUR LA RÉSILIENCE AU CHANGEMENT CLIMATIQUE
A)
B)
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A) Dispositif de captage des eaux pluviales : canalisation, citerne et pompe. B) Captage des eaux pluviales : toiture, gouttière et réservoir.
ENCADRÉ 2 : Action pilote de captage des eaux pluviales réalisée par SEARCH
Dans le versant Est du bassin Oued El Kebir, constitué de flyschs à stratification inclinée vers l’Est, les pentes sont fortes à très fortes (20 à 70%), les sols sont très pauvres, le matorral est épuisé par le pâturage et les sources d’eau s’assèchent en été. Même si les précipitations dépassent 1000 mm par an, les populations des douars Lahyout manquent cruellement d’eau en été
(Juin – Septembre). Répondre à ce besoin est la préoccupation vitale de ces douars et représente pour SEARCH une action pilote majeure de démonstration du processus de renforcement de la résilience face au changement climatique.
Les techniques de collecte sont nombreuses et varient selon les conditions climatiques et géomorphologiques locales. Généralement, le système de captage des eaux pluviales comprend essentiellement :
– un moyen de collecte tel que le toit, impluvium naturel ou aménagé, bassin construit… ;
– un moyen de transport de l’eau, à savoir canal, tuyaux de descente, gouttières… ;
– un dispositif de filtrage de l’eau avec un sous dispositif de décantation ;
– un réservoir de stockage ou une cuve ;
– un système d’épuration (ou distillation) de l’eau collectée.
La surface de captage domestique habituelle est le toit quelle que soit sa configuration. Néanmoins, il y a des risques sanitaires liés aux types de matériaux utilisés pour la toiture (métaux lourds) si l’eau est utilisée à des fins alimentaires. Certains types de surfaces favorisent le développement bactérien, tandis que d’autres, en particulier, les poreux ou rugueux retiennent les excréments d’oiseaux et d’autres polluants. Les impuretés et les contaminants agglomérés sur la surface de captage doivent être éliminés entre deux précipitations. Il faut laisser fuir les premiers ruissellements pour nettoyer la surface de collecte. Il suffit alors de récolter les premiers 40 à 80 litres dans une cuve distincte qui, une fois remplie, permet au surplus d’aller vers le réservoir de stockage.
De la gouttière à la citerne ou réservoir, l’acheminement de l’eau peut se faire à l’aide de la canalisation en aluminium, en acier galvanisé, en pvc ou autre. Cette canalisation doit être proportionnelle au débit de l’eau à acheminer.
Dans le site de démonstration, c’est le captage domestique (à l’échelle du foyer) qui a été privilégié. La collecte des eaux par la construction d’impluviums de grande capacité de stockage s’est avérée contraignante du fait de l’absence d’un terrain collectif approprié et des difficultés de l’entretien et de la maintenance.
Les toitures de l’habitat des douars du bassin sont pyramidales en zinc ondulé.
Les besoins en eau d’un foyer de 6 personnes, à raison de 25 litres/jour/habitant
(consommation marocaine : 5-40 l/j/habitant), sont estimés à 18m3 pour les 4 mois secs de l’année.
Les réservoirs sont des citernes semi-enfouies construites en béton armé pour des foyers, des écoles et mosquées. Il s’agit de cylindres de 2,80m de diamètre et de 2m de hauteur dotés d’une pompe mécanique de prélèvement d’eau et reliés à la toiture par une gouttière en zinc qui déverse dans un petit système de décantation en béton. Pour l’entretien du réservoir, les citernes sont accessibles par le sommet par un regard de visite de 60/60 cm de surface.
Le choix d’une pompe mécanique est dicté par la préservation de toute forme d’énergie conventionnelle (électricité, carburants, etc.). Les systèmes ainsi construits peuvent être équipés de moyens d’épuration des eaux s’ils sont utilisés à des fins alimentaires.
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APPROCHE ET ACTIONS POUR LA RÉSILIENCE AU CHANGEMENT CLIMATIQUE
Domestication des plantes aromatiques et médicinales
Le Maroc est riche en plantes aromatiques et médicinales. Toutefois, seules 80 espèces sont exploitées anarchiquement, souvent par les femmes, au profit d’opérateurs informels. La Stratégie Nationale de
Développement des Plantes Aromatiques et
Médicinales au Maroc (2009) énumère toute une série de contraintes, faiblesses et menaces, en particulier la pression de collecte exercée sur les PAM spontanées.
L’augmentation de la demande mondiale des PAM (15-25% par an), le caractère informel qui domine la filière, la pauvreté et
A)
32
B) C)
A) Pépinière et ombrière pour la multiplication des PAM. B) Pépinière avec système de brumisation. C) Parcelle de culture de l’Origan.
l’ignorance des exploitants, en plus de la dégradation du milieu naturel et des impacts climatiques, mettent cette flore en péril. Il est donc nécessaire d’anticiper des réponses adéquates qui intègrent le renforcement des capacités, l’organisation de la filière, la conservation des milieux naturels et la valorisation économique.
Dans ce sens, la domestication des PAM a
été développée par SEARCH conformément aux trois premières stratégies adaptatives (conservation des ressources naturelles, renforcement des capacités et diversification des revenus).
L’action pilote réalisée dans ce domaine est
étayée dans l’Encadré 3.
ENCADRÉ 3 : Domestication des PAM
A l’instar des autres zones du Rif occidental qui font partie de la RIBM, le bassin hydrique de Oued
El Kebir, inclus en grande partie dans le territoire du projet de parc naturel de
Bouhachem, recèle d’innombrables plantes aromatiques et médicinales. Cette flore s’écroule sous l’effet de l’intensification des prélèvements et la surexploitation, en plus de l’extension des défrichements, du surpâturage et de l’érosion des sols. Dans le but d’assurer la pérennité de cette ressource naturelle, SEARCH a élaboré et planifié avec les différentes parties prenantes la multiplication et la mise en culture de certaines plantes aromatiques et médicinales.
Suite à une étude détaillée de la filière, trois espèces ont été sélectionnées, en se basant sur les potentialités, l’exploitation, les menaces et la valeur commerciale, pour servir de démonstration : l’Origan compact, le Laurier sauce et le Thym. L’action de démonstration a été réalisée sur l’Origan. Elle a été menée avec la coopérative Al
Wafae du Douar Hmamiouech (CR Zinat). Composée exclusivement de femmes, cette coopérative dispose d’une serre et d’une ombrière détériorées, d’un puits sans pompe, d’une unité de séchage et de distillation et d’un terrain agricole où une mise en culture de certaines espèces a été tentée sans succès notable. Ce dysfonctionnement traduit des besoins énormes en formations spécifiques à la filière des PAM et en renforcement de capacités de gestion et de commercialisation.
C’est ainsi que l’équipe de facilitation du Projet SEARCH, en collaboration avec ses partenaires, a conçu et assuré un programme d’enseignement théorique et pratique au profit des membres de la coopérative. Dix neuf femmes membres -
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APPROCHE ET ACTIONS POUR LA RÉSILIENCE AU CHANGEMENT CLIMATIQUE
adhérentes ont suivi une formation sur la maîtrise des techniques de production, depuis la multiplication et la mise en culture jusqu’à la transformation et la valorisation. Certains membres, d’un niveau scolaire avancé, ont bénéficié aussi de cours de gestion et de commercialisation.
Au niveau équipement, SEARCH a pris en charge :
– la restauration de la serre de 110 m
2 et de l’ombrière de même superficie ;
– l’installation des systèmes d’irrigation goutte à goutte et de brumisation pour les deux structures ;
– l’équipement du puits d’une pompe électrique submergée ;
– la mise en place d’un système goutte à goutte pour une parcelle de terrain
(3000 m
2
) qui va servir de champ d’expérience démonstrative de la mise en culture.
La multiplication de l’Origan compact, d’origine locale, par bouturage a eu lieu au mois de janvier et sa plantation dans le champ s’est effectuée au mois d’avril. Pour le Laurier, la multiplication par semis a eu lieu en janvier et sa transplantation au champ a été réalisée au mois d’avril. Lors de l’opération de multiplication et de plantation des deux espèces aromatiques, les femmes de la coopérative, sous encadrement rapproché des membres de l’équipe technique de SEARCH, ont mené avec succès l’expérience de germination d’une variété locale d’Amandiers. Les pieds d’amandiers ainsi obtenus seront distribués, dans la limite du stock disponible, à tout agriculteur qui en fait la demande. L’équipe SEARCH aura ainsi contribué à la préservation et la propagation d’un produit du terroir.
Pour diffuser cette pratique culturale en dehors du bassin versant de l’Oued El
Kébir, une autre expérience est en cours de réalisation ailleurs. SEARCH s’est ainsi investi dans la plantation de l’Origan dans le terrain d’un agriculteur que l’équipe technique a convaincu de l’importance de l’apport financier des PAM par rapport à la céréaliculture. Il s’agit d’une parcelle de 3000 m
2
à proximité de la route reliant El
Hamra à Moulay Abdeslam afin de faire connaître la domestication des PAM. Après aménagement d’une source, installation d’un réservoir d’eau alimenté par une pompe et mise en place d’un système d’irrigation goutte à goutte, la parcelle est plantée de 6000 pieds d’Origan compact. Les plants produits par la coopérative Al
Wafae ont trouvé ainsi leur premier débouché. Par la plantation de cette parcelle en
Origan, SEARCH vise alors son intensification et son expansion dans la région.
Puisque le succès de cette action réside dans la commercialisation, l’équipe de facilitation a fait des démarches auprès des exploitants pour assurer l’écoulement de la production. Par ailleurs, parallèlement au projet SEARCH, le projet de mise en
œuvre de la stratégie nationale sur les PAM a entamé le processus de structuration de la filière de l’Origan dans la région. Les efforts déployés par SEARCH dans ce domaine ont des chances de fructifier à condition que les bénéficiaires réussissent leur ancrage à la stratégie nationale sur les PAM, laquelle est appelée à appuyer la domestication des PAM pour mener à bien sa mission.
A) B)
A) Four collectif amélioré. B) Détail d’un four collectif.
Fours à pain améliorés
Les fours à pain améliorés permettent de réduire la consommation de bois de feu, estimée de 10 tonnes par foyer par an, de 50 % (GEF RIF). Ils ont été promus par différentes ONG (ATED, GERES…) et largement adoptés soit comme four familial ou four collectif.
Dans le four traditionnel la combustion et la cuisson, se font en une seule pièce.
Dans le four amélioré les deux pièces séparées permettent d’assurer le niveau de propreté du pain cuit et de prolonger la durée de vie des braises par aération continue à travers le cendrier du four. Il s’agit d’un four fabriqué de métal sous forme d’une « armoire » à deux pièces : une pour la combustion du bois et l’autre pour la cuisson.
Ces fours améliorés permettent de réduire la corvée de la recherche du bois pour les femmes et diminuer l’impact négatif du prélèvement sur la forêt. De tels fours méritent d’être généralisés dans tout le rif occidental et dans toutes les régions où le prélèvement du bois fait des ravages.
Biométhanisation
La biométhanisation est un processus de dégradation des déchets organiques par des micro-organismes. Contrairement au compostage (en plein air), la biométhanisation ou digestion anaerobie se fait en absence d’oxygène et sous contrôle. Elle produit du biogaz qui constitue une source d’énergie renouvelable utilisable pour la combustion ou pour la production de l’électricité et de la chaleur comme il peut servir de carburant.
Le modèle développé par ATED et CDER dans la région de Chefchaouen est constitué de trois cuves reliées par des buses souterraines : cuve de chargement des déchets organiques, cuve de fermentation et cuve d’évacuation vers une fosse de stockage du digestat. La purge des eaux est assurée au niveau de
2-3 regards. Ces cuves peuvent être construites ou en pvc. Le transport du biogaz produit est assuré par un réseau.
La capacité des digesteurs installés dans des exploitations agricoles est de 20m3.
Le biogaz produit est utilisé dans la
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APPROCHE ET ACTIONS POUR LA RÉSILIENCE AU CHANGEMENT CLIMATIQUE
Sortie de biogaz
Cuve de chargemen
Digesteur
(fermentation)
Stockage digestat
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Figure 14. Schéma simplifié du dispositif de biométhanisation.
cuisson évitant ainsi la corvée de recherche de bois pour les femmes. Le digestat (résidus solides et liquides générés par la méthanisation) peut être utilisé comme fertilisant.
La biométhanisation représente une méthode de gestion durable et de valorisation des déchets organiques. Elle permet de produire de l’énergie propre, de réduire les prélèvements de bois et de diminuer les émissions de gaz. Cette technique devrait être appliquée au traitement de tous les déchets organiques qu’ils soient ménagers, agricoles ou agroindustriels.
Cuvettes en demi-lunes
C’est une technique qui permet de piéger les eaux de ruissellement dans une cuvette creusée autour du pied de l’arbre
15
. La cuvette doit être entourée d’un bourrelet en demi-lune de terre tassée ouverte face au sommet de la pente. La terre tassée peut être renforcée par des pierres.
Cette technique est efficace dans des zones à pente moyenne. Elle est aussi utilisée sur des terrains rocheux où le sol est réduit à des poches.
Les cuvettes en demi-lunes permettent d’atténuer l’érosion hydrique en réduisant la vitesse de l’écoulement et le captage des eaux assurant ainsi un appoint d’eau pendant la saison sèche. Elle favorise aussi l’accumulation des sédiments fins et des éléments nutritifs dans la cuvette.
C’est une pratique adéquate à la protection des sols dans les milieux montagneux méditerranéens et au développement de l’arboriculture.
15 E. ROOSE, M. SABIR et A. LAOUINA, 2010. Gestion durable des eaux et des sols au Maroc. Valorisation des techniques traditionnelles méditerranéennes. IRD Éditions, Marseille. http://horizon.documentation.ird.fr/
A)
B)
A) Plantation d’oliviers sur demi-lunes renforcées (http://vertigo.revues.org/9354). B) Olivier dans une cuvette en demi-lune. http://horizon.documentation.ird.fr/
Cordons de pierres
Les pierres extraites au cours du labour peuvent être empilées en cordons continus ou discontinus le long des courbes de niveau. Les cordons pierreux peuvent être enherbés ou associés à des arbres fruitiers.
C’est une pratique utilisée dans les sols pierreux sur des pentes moyennes à fortes.
L’empilement progressif favorise ainsi la formation de terrasses plus au moins horizontales.
Elle permet le dépierrage tout en atténuant l’érosion hydrique. Elle assure la protection du sol et favorise son enrichissement en sédiments et éléments nutritifs.
A)
B)
37
A) Cordons en pierres le long des courbes de niveau. B) Cordons en pierres évoluant vers des terrasses en gradins.
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B)
APPROCHE ET ACTIONS POUR LA RÉSILIENCE AU CHANGEMENT CLIMATIQUE
Terrasses avec murets
Sur pentes fortes, les terrasses méditerranéennes en gradins sont formées de talus protégés par des murets en pierres qui peuvent être soutenus par la végétation. La hauteur du talus et la largeur de la terrasse varient en fonction de la pente. Elles doivent être soigneusement conçues et entretenues en fonction du substrat pour éviter leur ravinement.
Cette pratique est utilisée depuis longtemps dans la région méditerranéenne sur pentes fortes à moyennes. Elle est déconseillée dans le cas des sols imperméables à risque sismique.
Ces terrasses permettent de limiter l’effet du ruissellement, augmenter la capacité de stockage de l’eau et des nutriments. Elles permettent aussi de faciliter le travail du sol et augmenter la surface cultivable.
A)
C)
A) Terrasses avec haies. B) Terrasses avec haies et murets en pierres. C) Touffes de palmier nain dans un champ
(humidité-consolidation du sol, exploitation de la plante).
Haies vives
Il s’agit de structures de végétation linéaire développée autour des parcelles de culture. Ces structures peuvent être spontanées ou plantées, arborées ou arbustives.
Les haies vives sont déployées pour limiter le parcours des animaux et améliorer le revenu lorsqu’elles sont en plantes de valeur (arbres fruitiers, PAM, plantes fourragères, bois de feu). Elles sont utilisées sur les terrains en pente et sont généralement associées aux cultures irriguées et à l’arboriculture.
Leur intérêt écologique est de ralentir le ruissellement et de protéger les banquettes, les talus et les terrasses en formation. Elles favorisent aussi l’humidité du sol et l’accumulation des sédiments et matière organique et assurent le rôle de brise-vent et d’habitat pour certaines espèces spontanées.
A)
B)
C)
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A) Evolution des bandes de végétation spontanée vers un système bocager. B) Haie le long d’un petit cours d’eau.
C) Système bocager du Rif occidental.
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