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Où, quand et comment observer les mammifères ?
Un indice de présence, un souffle, un bruissement à la tombée de la nuit, et nous nous disons : la bête est là ! Peut- être même est- ce elle qui nous observe ? Mais, ne l’oublions pas, nous ne devons pas venir sur son territoire pour la voir à tout prix, au risque de la déranger, mais pour partager avec elle un instant de vie.
Avant de partir
Les mammifères sauvages de nos régions sont des animaux difficiles à observer. Peu enclins à croiser les hommes, la plupart s’éclipseront sans même que vous ayez perçu leur présence. Beaucoup aussi sont nocturnes. Mais si vous mettez toutes les chances de votre côté, en vous équipant correctement, en faisant preuve de patience, de discrétion et d’ingéniosité, ils vous procureront une des plus belles émotions que la nature puisse offrir. Parfois même, la simple observation d’une trace suffira à vous ravir.
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S’équiper
La façon de se vêtir dépend bien sûr de la météo et des milieux que l’on veut visiter. N’oubliez pas en particulier les
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bottes pour les promenades matinales après une nuit fraîche
(risque de rosée), un pantalon et un vêtement à manches longues pour les promenades ou les affûts crépusculaires et nocturnes à la belle saison (limite les piqûres de moustique).
Portez également des vêtements aux couleurs neutres afin d’être moins visible.
Check- list
– des jumelles ;
– un appareil photographique ;
– un guide d’identification ;
– un carnet et un crayon à papier ou un porte- mine ;
– la carte topographique du secteur visité ;
– un GPS pour noter les coordonnées de vos observations ;
– une règle ou un mètre déroulant ;
– une petite loupe ;
– des pochettes et des piluliers pour la récolte d’indices ;
– deux lampes, des piles et des ampoules de rechange.
En option
– un détecteur de cris ultrasoniques de chauves- souris
(sauf en hiver) ;
– une longue- vue et un trépied (pour les affûts) ;
– une tente affût. On en trouve aujourd’hui des légères, peu encombrantes et faciles à monter.
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Un conseil important
Si vous vous promenez en été dans des forêts où abondent les grands ongulés, les cerfs en particulier, remontez vos chaussettes sur les jambières de votre pantalon, ou bien portez des guêtres : vous limiterez ainsi les risques de récolter des tiques. Pensez à vous inspecter au retour.
Bien choisir sa paire de jumelles
Il faut privilégier des jumelles légères, peu encombrantes, lumineuses, car les rencontres sont souvent crépusculaires, et
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10 qui permettent une mise au point rapprochée (1,8 m) pour l’observation des micromammifères. Des jumelles qui grossissent huit ou dix fois suffisent largement. Au crépuscule, avec une très bonne paire de jumelles, vous serez même parfois
étonnés de constater que vous pouvez encore parfaitement distinguer les détails d’un animal alors que vos yeux seuls ne voient plus qu’une ombre, un peu comme si les jumelles amplifiaient la lumière.
Pourquoi un appareil photographique ?
Ne partez pas uniquement avec l’objectif de réaliser une excellente photographie d’un animal. Les observations furtives, lointaines, ou dans des conditions de luminosité difficiles, ce qui est souvent le cas, ne s’y prêtent pas. Vous aurez peut- être la chance de rencontrer un individu peu craintif ou distrait, et de rentrer de votre promenade avec un beau cliché. Mais la photographie opportuniste de mammifères est peu rentable dans nos régions. Il est en revanche tout à fait aisé de photographier les indices de présence. Le cliché d’une empreinte, par exemple, auprès de laquelle a été placée une règle, constitue un bon document pour une détermination ou une confirmation ultérieure. Pas besoin d’un appareil sophistiqué pour cela.
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Bien préparer sa sortie
Observer un mammifère n’est pas chose facile. Les rencontres peuvent se faire au hasard de vos promenades, mais vous augmenterez considérablement vos chances en préparant votre sortie. Il faut en particulier bien choisir le lieu et le moment.
Où les observer ?
Si vous recherchez un mammifère particulier, il faut tenir compte de son aire de répartition. L’habitat visité dépend également de l’animal convoité.
Pour les gros animaux, il est préférable de rechercher des zones dégagées qui permettent de les observer à distance (lisières, clairières). Même les espèces forestières fréquentent ces zones de transition, et sont plus faciles à voir qu’en sous- bois. Les lieux où les animaux viennent boire, comme les mares forestières, constituent également des endroits privilégiés pour des affûts.
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L’observation attentive d’une clairière peut réserver de belles surprises, comme ce loup gris
Certaines chauves- souris peuvent être observées lorsqu’elles quittent leur gîte (cavités souterraines, bâtiments). Elles apprécient aussi les plans d’eau, les lampadaires… Elles sont plus difficiles à voir en forêt. Vous pouvez repérer certains de ces endroits sur les cartes ou sur les photos aériennes aujourd’hui disponibles sur Internet, et ainsi prévoir votre parcours ou votre lieu d’affût.
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Grand murin en chasse
Quand les observer ?
Les moments de la journée
C’est au crépuscule ou à l’aube que vous aurez le plus de chance de voir les mammifères en pleine activité, au moment où les bêtes du jour et de la nuit se croisent. Certaines espèces de chauves- souris ne sortent toutefois qu’une fois la nuit tombée.
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En revanche, les mammifères marins, comme les phoques ou certains ongulés de montagne (chamois, bouquetins, etc.), s’observent très bien en pleine journée.
Les saisons
Dans notre région, on peut voir des mammifères terrestres toute l’année. Aucune espèce n’est totalement migratrice, même si certains individus le sont localement. C’est différent pour certains mammifères marins qui quittent nos eaux en hiver ou s’éloignent des côtes une partie de l’année.
Quelques espèces hibernent dans des lieux inaccessibles. Inutile donc de les rechercher en hiver. D’autres sont au contraire plus actives au printemps ou en automne : vous trouverez toutes les informations nécessaires dans les fiches de description des espèces.
À propos de la météo
Les mammifères sont assez peu sensibles aux conditions météorologiques du moment, sauf les plus extrêmes. Lors d’une journée légèrement pluvieuse, les petits mammifères sortiront peut- être de leur gîte pour croquer quelques escargots ou autres invertébrés que l’humidité du sol aura fait remonter à la surface.
En revanche, quand la pluie est battante, les animaux font comme nous : ils se mettent à l’abri et ne bougent plus ! Ils feront de même si la chaleur est écrasante. La météo influe surtout sur les conditions d’observation. Vous aurez donc toujours intérêt
à consulter la météo la veille de votre sortie.
Observer les mammifères
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L’approche
Soyez discret et astucieux
Lorsque l’on recherche des mammifères, il faut toujours se déplacer silencieusement, sans mouvement brusque et, si possible, à contre vent. Certaines espèces n’ont pas une bonne vue, et marcher le long d’une lisière ou sur le bord du chemin forestier, plutôt qu’au milieu, permettra de moins se faire remarquer.
Si vous avez la chance de croiser un animal, immobilisez- vous et accroupissez- vous lentement. Si le vent est avec vous
(c’est- à- dire face à vous), vous aurez peut- être la surprise de le voir s’approcher car, curieux, il voudra identifier cette étrange forme qui s’invite sur son territoire.
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Cerf élaphe intrigué par l’observateur
Sachez écouter
Au cours de votre progression, arrêtez- vous régulièrement pour regarder si un animal n’est pas sur votre route. Cette pause est aussi l’occasion d’écouter les bruits de la nature. L’un deux vous indiquera peut- être qu’un mammifère se déplace dans le sous- bois.
N’oubliez pas les abris
Vous pouvez aussi soulever des morceaux de bois, qu’il faudra bien remettre en place, sous lesquels peuvent se cacher des micromammifères. Attention toutefois aux vipères qui peuvent également s’y trouver. Un coup de lampe rapide dans un trou d’arbre ou sous une souche peut aussi vous apporter une belle surprise.
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Jeunes martres des pins dans leur gîte
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Cherchez les indices de présence
Sur le chemin, vous pouvez également chercher des indices de présence (voir le chapitre « Comment détecter la présence des mammifères », p. 18). L’un d’eux, tout frais, vous apprendra peut- être que l’animal est tout proche, et vous donnera l’occasion de l’observer.
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L’affût
La technique de l’affût consiste à se poster en un lieu et à attendre l’animal. Elle nécessite de bien connaître les lieux et les habitudes des animaux pour éviter d’attendre inutilement.
Après plusieurs tentatives infructueuses et de longues attentes, la satisfaction de voir enfin évoluer des animaux en toute quiétude à quelques dizaines de mètres de soi est immense.
On risque beaucoup moins de leur faire peur que lorsqu’on tente de les approcher.
Choisir son point d’affût
L’affût convient à l’observation de beaucoup d’espèces, y compris les plus petites (micromammifères, chauves- souris), que vous pourrez attendre à la sortie de leurs terriers, de leurs nids ou de leurs gîtes. Néanmoins, il ne faut pas perturber leurs allées et venues. Pour cela, il faut se poster à la distance adéquate.
Il faut bien sûr tenir compte des conditions de visibilité et du sens du vent avant de choisir son point d’affût. Si celui- ci se fait à faible distance de l’animal convoité (un renard roux ou un blaireau européen à la sortie de son terrier par exemple), vous aurez tout intérêt à prendre un peu de hauteur dans un arbre pour limiter encore les risques que l’animal vous sente.
Se dissimuler
Il n’est nul besoin de construire une cabane. Si toutefois le cœur vous en dit, il faudra alors vérifier que vous êtes dans un endroit où cela est autorisé. Une solution alternative est d’apporter avec soi une tente affût pliable. La plupart du temps, il suffit de s’asseoir contre le tronc d’un arbre ou contre un rocher, à l’ombre et si possible caché par un peu de végétation pour gommer sa silhouette.
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Choisir le moment propice
Il est important d’arriver suffisamment tôt pour être en place quand l’animal sera susceptible d’apparaître. Une demi- heure avant le coucher du soleil (et donc une heure avant l’obscurité) est un bon choix pour les animaux crépusculaires et nocturnes, y compris les chauves- souris.
Hamster à l’entrée de son terrier
S’armer de patience
Quand les animaux se présentent devant l’affût, vous aurez alors peut- être l’impression de ne plus être un intrus. Mais c’est une fausse impression. La moindre erreur peut vous faire repérer et votre vigilance ne doit pas faiblir. Après avoir eu la patience d’attendre la venue des animaux, il faut aussi avoir celle d’attendre leur départ avant de quitter les lieux.
À l’affût des mammifères marins
Il peut paraître surprenant de traiter les mammifères marins dans un paragraphe consacré aux affûts. Toutefois, il est parfois possible de les observer depuis un point haut de la côte. Les falaises du nord de la France ou celles de Corse s’y prêtent bien.
Bien sûr, dans ce cas, les précautions à prendre sont moindres car il n’est pas nécessaire de se fondre dans le paysage. La chance joue certainement toujours un peu pour les baleines et les dauphins car, même si l’on connaît un secteur fréquenté, ces animaux sont très mobiles. On peut parfois s’aider des oiseaux marins.
Un grand nombre d’entre eux en train de pêcher indique la présence d’un banc de poissons. Celui- ci aura peut- être également attiré des dauphins. Les phoques sont plus casaniers et chassent souvent dans les mêmes secteurs.
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Observer sans déranger
Ne réveillez pas les chauves- souris
L’approche des chauves- souris est particulièrement délicate.
Il est toujours préférable d’être accompagné d’une personne les connaissant bien. Elle saura comment les observer sans les déranger. Une intrusion inopinée dans un gîte de reproduction
(grenier, combles, cavité souterraine) provoque généralement un mouvement de panique. Les espèces occupant des espaces
étroits, comme des fentes entre des poutres ou des fissures, se contenteront de s’enfoncer le plus profondément possible dans ceux- ci. Mais celles qui se suspendent au plafond s’envoleront dans tous les sens. Outre le stress provoqué par de tels dérangements, la perte d’un jeune par sa mère n’est pas à exclure. Si vous connaissez de tels gîtes, le mieux est donc de renoncer à y pénétrer sans une bonne raison. La visite d’un gîte d’hiver (grotte, galerie, mine, cave, etc.) est a priori moins problématique si les animaux dorment profondément. Mais, là encore, l’approche doit se faire avec beaucoup de précaution et silencieusement. Les arrêts pour observer les chauves- souris que vous y trouverez doivent être courts pour limiter les risques de réveil. Éclairez les animaux le moins longtemps possible, et évitez de les photographier. Gardez en mémoire que les chauves- souris ne partent quasi jamais en chasse durant l’hiver.
La seule énergie dont elles disposent durant cette période est celle provenant de la graisse stockée pendant la belle saison.
Dormir est la meilleure façon de l’économiser, tout réveil entamant leurs réserves et diminuant leurs chances de survie.
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Colonie de reproduction de petits rhinolophes
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